Informer de la cession de l'entreprise : une loi obscure

La loi du 31 juillet 2014 relative à l'ESS est notamment issue du constat suivant : si les sociétés lucratives trouvent facilement preneur, il en est autrement pour celles à la rentabilité plus aléatoire. Mais ces dernières, faute de repreneur, sont alors parfois contraintes de cesser leur activité et nombre de salariés se retrouvent sans emploi.
Laurent Bern, avocat collaborateur chez Colbert Avocats et Me Catherine Couriol, avocate associée chez Colbert Avocats

L'intention du législateur était certes louable : sauvegarder l'emploi en permettant aux salariés d'acquérir leur outil de production. Mais la loi sur l'ESS institue depuis le 1er novembre 2014, dans les sociétés de moins de 250 employés, une procédure d'information préalable des salariés en cas de projet de cession de contrôle majoritaire ou du fonds de commerce. A défaut, la sanction est lourde puisque la nullité de la cession est encourue.

Des couacs en série

Malheureusement, à la seule lecture de ce dispositif, on constate que la loi ne remplit pas son objectif, à savoir favoriser la transmission des entreprises et la pérennité des emplois.

En effet, à première vue, on comprend que l'obligation d'information des salariés s'enclenche à partir du moment où il existe un projet de cession, ce qui suppose donc l'existence d'un repreneur.

Or, s'il y a un repreneur, l'entreprise n'est pas dans la situation que la loi vise à traiter. Il y a donc une erreur de ciblage, premier couac. De plus, pour cette entreprise qui a un repreneur, on va compliquer le processus de cession, voire l'hypothéquer avec un processus contraignant d'information des salariés. Deuxième couac.

Ensuite, on découvre que l'information pourra se faire de façon tout à fait souple : réunion d'information, affichage, courriels, remise en main propre, etc. Bref, ce volet réglementaire ne devrait pas poser de difficultés majeures.

La situation se gâte par la suite

Ainsi, il est précisé que cette information doit être notifiée au plus tard deux mois avant la cession. Et le législateur de croire qu'il est possible d'assouplir ce processus d'information en prévoyant la possibilité d'abréger ce délai. Comment ? En obtenant de chacun des salariés la certitude qu'il ne présentera pas d'offre.

Autant dire une vraie sinécure dans les grosses PME... Et si la cession envisagée n'intervient pas dans les deux ans à compter de l'expiration de ce délai de deux mois, tout projet de cession devra être de nouveau soumis à la même procédure.

Quant au contenu de l'information, celle-ci doit simplement indiquer la volonté de cession et la possibilité pour les salariés de présenter une offre. Néanmoins, doit-on véritablement considérer que le processus d'information des salariés s'enclenche seulement en présence d'un repreneur potentiel ?

En effet, si une partie de la doctrine estime que c'est bien le cas comme évoqué précédemment, force est de constater que la loi est tout à fait obscure sur ce point. Toujours est-il que la loi est applicable depuis le 1er novembre.

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Commentaire 1
à écrit le 16/02/2015 à 10:47
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Encore une élucubration de nos chers politiques qui pose plus de questions qu'elle n'en résout.... compte tenu des turpitudes dans lesquelles les dirigeants de PME vont être plongées. Ce texte de loi laisse croire que les salariés sont de futurs repr...

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