Les chiffres sont accablants : chaque année en France, 100 000 enfants sortent du CP sans savoir lire ni écrire ; on compte plus de 130 000 décrocheurs chaque année, ces élèves qui quittent l'école avant la 3e et ne seront plus jamais scolarisés. "Cela représente 1,5 million de jeunes en dix ans, c'est un drame collectif, notre drame à tous", lance Michel Lussault, président du Conseil supérieur des programmes et directeur de l'Institut Français de l'Education.
Des arguments plutôt que des coups
Claude Thelot, ancien président de la Commission du débat national sur l'avenir de l'école, situe l'enjeu :
"Aujourd'hui - et cela n'était pas le cas dans le passé - réussir à l'école est nécessaire pour réussir sa vie. Cet échec de notre système scolaire doit devenir un enjeu de société, il en va de la cohésion sociale ; savoir échanger des arguments plutôt que des coups !"
Face à cette école défaillante, qui s'avère en outre très inégalitaire (la France est dans la queue du classement de l'OCDE, juste devant la Turquie), les intervenants ont proposé des solutions. Il faut que l'école se tourne plus vers l'apprentissage et non la simple transmission.
"Faire un bon cours ne suffit plus. Il faut que les professeurs fassent acquérir connaissances et compétences et s'assurent que leurs élèves les ont bien acquises. Cela passe par de la présence, de l'accompagnement. Or on mesure le rôle du professeur à un nombre d'heures hebdomadaires, c'est tout", stigmatise Claude Thelot.
Le rôle des sciences expérimentales
Dans le cadre de ses fonctions, Michel Lussault a été amené à définir un socle de fondamentaux pour l'école. On trouve en premier lieu, la maîtrise des langages : le français, des langues étrangères, le langage scientifique. Mais aussi la maîtrise de méthodes, car l'acquisition de connaissances passe par des procédures.
"L'école doit leur donner ce qu'il n'est pas possible d'ignorer. C'est très important d'inclure des rudiments de sciences expérimentales, car la science donne les moyens d'observer, de comprendre, de discuter. Et conduit au savoir-vivre ensemble", poursuit Claude Thelot.
Parents essentiels
Autre constat amer : l'école française s'est construite contre d'autres institutions sociales, en premier lieu, les familles. L'école s'est sanctuarisée.
"Il est essentiel d'impliquer les familles, mais au-delà, de pratiquer la co-éducation avec les chefs d'établissement, les associations péri et para-scolaires...", souligne Michel Lussault.
C'est ce que pratique avec succès depuis 20 ans l'association "Coup de Pouce"(soutenue par CIC Lyonnaise de Banque) dont le président Robert Bourvis expliquait :
"Les Clubs Coup de Pouce Clé interviennent le plus tôt possible, en CP, et implique les parents et toute la communauté locale, enseignants, services municipaux ... Coup de Pouce a accompagné 11 000 enfants. Au-delà des apprentissages, ils ont retrouvé la confiance en eux et le goût pour l'école."
Les deux spécialistes ont confiance dans les enseignants pour relever ces challenges : "ce sont de grands professionnels", assure l'orateur. Et Michel Lussault insiste : "il n'y a pas de société démocratique qui puisse se passer de la réussite de... chacun".
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