Si Lyon souffre de pollution, d'engorgement, désespère ses habitants en déplacement, un coupable émerge : la voiture. « Pour les déplacements, la voiture est une formidable solution individuelle mais un gros problème collectif », décrit Yves Crozet, président du LET (Laboratoire d'Economie des Transports) jusqu'en 2007 et professeur à l'IEP. Coûteuse, souvent inefficace, dévoreuse d'espace urbain, à l'origine d'un tiers de la pollution urbaine : les Lyonnais sont-ils prêts à renoncer à la voiture ?

Vive le covoiturage

Tendance significative, on observe une chute des permis de conduire chez les jeunes, usant plutôt du covoiturage, de l'autopartage ou même mettant leur voiture en location par internet. « L'économie collaborative s'immisce dans la mobilité. Il est bien plus important désormais pour ces jeunes de posséder un téléphone portable plutôt qu'une voiture », constate encore Yves Crozet. Pour Jean-Yves Toussaint, responsable scientifique du Labex « Intelligence des Monde Urbains », cet essor du covoiturage s'apparente à une révolution : « la voiture, transformée par les modalités sociales, n'est plus qu'un usage et non une propriété. Cela changera de plus en plus notre vision de la propriété ».

Et la voiture électrique ?

La voiture électrique, qui rejette moins de CO2 et pas de micro particules, émerge-t-elle sur l'horizon 2020 ? Matthieu Terenti, responsable du programme « smart grids » (ces systèmes électriques intelligents) chez ERDF, direction régionale Rhône-Alpes Bourgogne, en est un ardent défenseur : « Lyon est pionnière en la matière, on compte plusieurs opérateurs en particulier sur le quartier de la Confluence. Des agents d'ERDF, ou de la Poste utilisent de plus en plus souvent des véhicules électriques, leur retour d'expérience apparaît très positif. »

La Compagnie Nationale du Rhône est depuis 2010 un producteur indépendant d'électricité - produite exclusivement à partir d'énergies renouvelables - et donc forcément concernée par la voiture électrique. Frédéric Storck, directeur de la gestion de l'énergie à la Compagnie, pointe une exigence pour le futur : « si il faut construire une centrale à charbon pour satisfaire notre appétit pour les voitures électriques, où est le gain anti-pollution ? Ajoutons de l'information, croisons les synergies entre la voiture électrique et les énergies renouvelables ».

Quelle société voulons-nous ?

Avec 320 déplacements par an, le Lyonnais semble un champion des transports en commun. Métro, bus, tramway on totalise dans l'agglomération 450 millions de voyages annuels, « et 70% de ces déplacements se font sous un mode électrique », précise Bernard Rivalta, président du SYTRAL, syndicat mixte qui a la haute main sur les transports lyonnais. Il défend une approche pragmatique pour ne jamais perdre de vue le lien social, le développement économique « et le respect de la liberté de chacun. A Lyon, nous n'avons pas de dogme et nous sommes souvent pionniers : premier métro automatique, premier bus à plancher bas… nous testons actuellement les bus hybrides ».

Les bonnes questions à se poser pour l'avenir : pourquoi doit-on se déplacer ? Quel type de déplacement résolvent la voiture, les transports en commun ? Où vit-on, où travaille-t-on ? « Ces questions de mobilité sont politiques, il nous faut toujours nous interroger : quelle société future voulons-nous ? », insiste Jean-Yves Toussaint,  « consommer de la mobilité c'est consommer de l'énergie, des objets. Voulons nous cela à toute force ? Ou préférons nous rester humain ?»