Régionales 2015 : Laurent Wauquiez, le portrait d'un dynamiteur

Laurent Wauquiez a remporté dimanche les régionales en Auvergne Rhône-Alpes. Durant la campagne les décideurs économiques et chefs d'entreprise exprimaient une attente prudente et exigeante, inquiète et excitée vis à vis du candidat LR. Le député-maire du Puy-en-Velay ne manque pas d'atouts pour la satisfaire. Ni de raisons de la décevoir. Enquête sur une personnalité qui séduit ou indispose, sur un « animal politique » riche ou otage d'une ambition illimitée.

Article édité le 23/09/15 et mis à jour le 14/12/15 à 00h10

Laurent Wauquiez s'est nettement imposé dimanche à la tête de la nouvelle grande région Auvergne Rhône-Alpes avec 40,6 % des voix. Pourtant avant la campagne sa candidature ne faisait pas l'unanimité.

« Quel dommage que le candidat des Républicains ne soit pas Michel Barnier ». Dans les cénacles socio-économiques d'Auvergne et de Rhône-Alpes et parmi les représentants emblématiques des chefs d'entreprise, ce regret dominait largement avant la campagne.

Sa disponibilité pour la fonction, l'absence d'ambition nationale ultérieure, la puissance de ses réseaux et sa maîtrise des méandres décisionnels au sein d'instances européennes qui conditionnent une grande partie de l'avenir et du financement des territoires, son enracinement dans une région qu'il participa à propulser à la reconnaissance planétaire lors des Jeux olympiques d'Albertville de 1992, le créditaient d'un quasi plébiscite... jusque dans les rangs des (nombreux) déçus du socialisme, séduits par la grande compatibilité de leurs aspirations voire la porosité de leurs convictions avec celles de l'ancien Commissaire européen au marché intérieur et aux services.

Un exercice "apartisan"

La Région est une institution sommée de fédérer, d'orchestrer des collaborations avec chaque autre collectivité, et exige un exercice « apartisan » et transcendant de la responsabilité ; la personnalité de Michel Barnier assurait, notamment dans la complexe harmonisation des compétences avec les nouvelles métropoles, la suprématie de l'efficacité et du pragmatisme chers aux édiles... Gérard Collomb, président de la Métropole de Lyon, en tête. Et face à cet inventaire laudateur, son excessive assurance et l'attentisme dont il fit preuve auprès des élus de son camp et notamment d'une jeune génération indifférente à l'argument européen et contaminée par le recentrage national(iste) du discours politique et programmatique, étaient censés peu peser au moment de la désignation par les instances de l'UMP. C'était sans compter sur la « force de frappe » de son adversaire Laurent Wauquiez.

L'obsession de la singularité

Les motivations de ce soutien massif, toujours d'actualité, des chefs d'entreprise en faveur de l'ancien élu savoyard, résultent en premier lieu de ses atouts intrinsèques. Mais pas seulement. Elles sont aussi consolidées par les interrogations voire les gênes inhérentes à la personnalité de celui qui, à l'issue d'une intense campagne dans les instances nationales et auprès des élus UMP de la région, est parvenu à l'évincer de la candidature finale.

Personnalité volontiers clivante, provocatrice, insaisissable, Laurent Wauquiez est adepte des « sorties » chocs essentielles pour ciseler une identité idéologique, cimenter un positionnement politique, modeler une réputation, et s'assurer une lisibilité médiatique. A l'heure des réseaux sociaux, des diktats de l'instantanéité, du spectacle et du narcissisme informationnels, l'existence et la reconnaissance politiques recourent à la singularisation. Coûte que coûte. Cela, le député-maire du Puy-en-Velay l'a intégré, et sa proximité assumée avec le sulfureux Patrick Buisson ex-directeur de la rédaction de Minute, relève peut-être davantage du calcul que de la doctrine, de l'opportunisme circonstanciel que de la stratégie à long terme.

Unanimisme de façade

Personne n'a oublié au printemps dernier, jugée jusque dans ses propres rangs « indigne » et « frontiste », son outrancière corrélation du terrible assassinat de la petite Chloé avec « la politique de désarmement pénal de Christian Taubira », personne n'a oublié ses propos confus sur une homosexualité estimée contraire à ses valeurs, personne n'a oublié, en 2011, son assimilation de l'assistanat au « cancer de la société » ni sa conviction que « maintenir intacts l'indemnité ou le salaire en cas de maladie n'est pas très responsabilisant »...

Une personnalité donc qui peut diviser, ostraciser, contingenter, et ainsi ne correspond guère à la « culture » politique et économique très consensuelle archétypale du territoire rhônalpin. Ni bien sûr à l'ADN des formations centristes Modem et UDI, qui durant l'été ont finalement rallié sa candidature (la première toutefois de manière encore très précaire) après l'avoir anathématisée sans retenue :  « Sa candidature est incompatible avec nos valeurs », déclarait le président du Modem François Bayrou le 26 avril, « il est crypto-lepéniste, anti-européen, et incarne une droitisation extrême qui ne nous permet pas de faire liste commune », renchérissait le président de l'UDI Jean-Christophe Lagarde...

Quant à l'unanimisme affiché au sein même des Républicains, il n'est que de façade : les animosités humaines ou idéologiques contre le poulain de Brice Hortefeux y sont une réalité, et le « pouvoir » de désignation et donc de pression qu'il détient en sa qualité de secrétaire général en charge des fédérations, des élections, des adhésions et de la formation des élus, n'est pas étranger à l'ampleur du ralliement. Le verdict des urnes et les « mystères » du secret de l'isoloir pourraient d'ailleurs réserver des surprises au sein du camp de droite.

« Formidable machine de guerre »

Qu'ils émanent de proches collaborateurs ou de personnalités économiques qui l'ont approché de loin, les arguments, détails ou impressions dressent à l'unisson une personnalité contrastée. Intellectuel brillant - Ecole normale supérieure rue d'Ulm, DEA de droit public, premier à l'agrégation d'histoire et major de l'ENA -, riche d'une carrière politique déjà impressionnante - il fut député à 29 ans, secrétaire d'Etat et porte-parole du gouvernement à 32, ministre des Affaires européennes à 35 -, le très précoce Laurent Wauquiez (40 ans) est un « animal », un « pur-sang », une « formidable machine de guerre », doté d'un sens « hors norme » de la politique, et nourri par une ambition de réussir elle aussi « exceptionnelle ».

« Il n'est pas un pilote de bateau à moteur, qui se dirige droit vers l'objectif ; il est un compétiteur de voile, qui sait tirer les bords et prendre tous les vents - même contraires - pour atteindre son but. Sa colonne vertébrale est de bambou, elle n'est pas de chêne. Mais on fait aussi de belles forêts en plantant des bambous », métaphorise une figure lyonnaise de l'entrepreneuriat. « Il est dans l'opérationnalité et le coup de l'instant, il séduit les jeunes générations par son habile présence sur les réseaux sociaux, mais il identifie de manière si osmotique son ambition politique à son action politique qu'il n'exerce pas cette dernière avec le recul, la distance, la hauteur toujours suffisants pour lui donner consistance, densité et vision. C'est d'ailleurs étonnant venant d'un aussi brillant diplômé en histoire, précise un ancien bras droit. Tout, dans son ambition, est conquête, accumulation et extension du pouvoir, pour un jour être Président de la République ».

"Le loup dans la bergerie"

Et tout est-il bon pour y parvenir ? Dans son foudroyant « Portrait d'un arriviste » qu'il consacra le 22 mai au « Bad boy de la droite », Le Monde n'édulcorait rien d'une trajectoire personnelle et d'un parcours professionnel jugés opportunistes, antonymiques, duplices, sophistes, parfois même mythomanes, mégalomanes et asséchés d'humanité. « Tueur, Judas, narcissique obsessionnel, Laval au petit pied » : celui qu'un disciple de Nathalie-Kosciusko-Morizet assimile à « Poutine », celui que la sénatrice UDI Chantal Jouanno juge être « le pire des hommes politiques, capable de courir systématiquement derrière le FN et de lâcher toutes ses idées et tout le monde pour changer de posture au gré de l'opinion publique », était exhibé là dans ses attributs les plus dégradants.

Paroxysme de cette « exécution » journalistique, les détails du divorce de l'intéressé avec celui qui « l'installa » véritablement en Haute-Loire et lui confia les clés électorales de son ascension : l'ancien ministre et Commissaire européen Jacques Barrot, qui plus tard confiera « avoir fait entrer le loup dans la bergerie. Si je pouvais changer quelque chose dans ma vie, cet homme ne mettrait pas les pieds en Haute-Loire. C'est mon grand remords ».

Stratégie schizophrénique ?

Au-delà d'un portrait dont la partialité de l'angle, assumée, ne reflète nécessairement qu'une partie du visage, quelques interrogations demeurent, qui inquiètent au sein de l'aréopage économique et entrepreneurial, jusque parmi ses soutiens. La mise en œuvre de la nouvelle Région et l'ampleur des chantiers à accomplir exigent une disponibilité a priori incompatible avec l'engagement auquel sa stature et son ambition le destinent dans la future campagne présidentielle. Comment arbitrera-t-il ?

En cas de victoire des Républicains et particulièrement de Nicolas Sarkozy en 2017, l'éventail des sollicitations nationales pourrait être considérable. Qui peut croire qu'au moins jusqu'en 2020 il résistera à la tentation d'un ministère régalien, a fortiori de Matignon ?

L'une des « clés » de son succès aux commandes de la Région résultera de sa volonté et de sa capacité à rassembler au-delà des fractures idéologiques et des combats personnels, à renoncer à la chasse aux sorcières au sein de la collectivité, mais aussi à co-construire avec les artisans de l'identité et de la logique métropolitaines. Y est-il fondamentalement disposé, et peut-il mener de front une stratégie schizophrène de rupture, de morcellement, de stigmatisation à l'échelon national mais de compromis et de rassemblement dans sa région ? « S'il est élu, il devra faire honneur à l'impressionnant potentiel de la région et faire sien le formidable esprit de collaboration supra-partisan qui a conditionné le développement économique ces dernières années, à l'image de Grand Lyon Esprit d'Entreprendre. Il est attendu sur ce terrain », résume François Turcas, président de la CGPME Rhône-Alpes.

Tentation de la séquestration

Le député-maire du Puy-en-Velay pourrait aussi avoir la (grande) tentation d'exploiter le débat public en Auvergne Rhône-Alpes aux fins de nourrir celui, national, ante Présidentielles, au risque alors de désunir l'échiquier décisionnel local et de pénaliser la dynamique d'un territoire qui produit 11,5 % du PIB hexagonal, trône au septième rang des régions européennes, et tutoie la taille de la Suisse (population) et de l'Autriche (PIB). Saura-t-il renoncer à ce que d'aucuns assimileraient davantage qu'à de l'instrumentalisation : une prise d'otage ?

Enfin, les décideurs économiques auvergnats ont en mémoire cette funeste journée du 1er juin 2015 : à la demande de l'intéressé plusieurs mois plus tôt, une journée entière lui était consacrée pour rencontrer les chefs d'entreprise réunis successivement par différentes instances représentatives du patronat ; la veille au soir, qui clôturait le congrès fondateur des Républicains, un texto laconique les informait de l'annulation de sa venue, retenu à Paris par le désormais nouveau président Nicolas Sarkozy.... « Que doit-on en conclure ? Qu'il néglige les patrons et l'entreprise ? Que cela préfigure son mode de fonctionnement futur une fois aux commandes simultanément de la Région et de responsabilités nationales ? », questionne l'un des principaux représentants du patronat local.

"Grande capacité d'écoute"

Aussi légitimes ou fondées soient-elles, ces interrogations, craintes et admonestations ne reflètent bien sûr que partiellement une personnalité riche de singularités reconnues au-delà de son cercle d'admirateurs. Et même certains parmi les plus prudents ou rétifs de la première heure pondèrent désormais substantiellement leur jugement, au fur et à mesure qu'ils le côtoient et l'apprivoisent. Le témoignage de Bruno Lacroix, ancien président du Conseil économique, social et environnemental (CESER), résume bien cette patiente mais réelle métamorphose. Lui qui fut l'un des plus fervents soutiens de Michel Barnier et participa même activement à l'élaboration de son pré-programme économique, reconnaît « une grande capacité d'écoute » et une « rare faculté à intégrer les observations même les plus désagréables », un style « emballant », une « qualité de contact et un sens de la proximité étonnants ».

Bruno Bonnell (président d'EMLYON et d'Awabot), fidèle de Gérard Collomb et peu suspect de prosélythysme de Droite, loue sa faconde, une agilité et une fulgurance intellectuelle « exceptionnelles », une dextérité, une réactivité et une capacité à « lire l'adversaire » « dignes d'un bretteur » - épéiste adepte de l'escrime artistique, NDLR -... et une attention « aiguë » aux enjeux de l'école de commerce.

Les vertus de l'âge

Quant aux incontestables « vertus de l'âge », le créateur du salon Innorobo les met en perspective de sa propre expérience. « Avant 50 ans », constate-t-il, la conscience de la mortalité est si faible et la perception de l'éternité si élevée qu'elles encouragent à accomplir tout ce à quoi la planète entrepreneuriale exhorte : « prises de risque, audace, fougue » ; au-delà de cette barre fatidique, la disposition à « oser » commence de décliner, le repli technocrate de gagner du terrain, l'esprit d'innovation d'hoqueter.

« Or, à quoi doit-on appeler en premier lieu le futur président de Région ? A oxygéner et « agiter » Auvergne Rhône-Alpes, à en faire le territoire de toutes les expérimentations possibles et ainsi lui donner une « identité entrepreneuriale » reconnue partout ailleurs, à l'instar par exemple du Nevada qui sert de laboratoire américain à la circulation des véhicules sans chauffeur. Cela constituera le meilleur des leviers d'attractivité à l'international et d'investissements étrangers, notamment en R&D. Cet objectif nécessite d'être dans l'audace non seulement d'innover tous azimuts aux plans social et technologique, mais aussi de savoir esquiver ou dépasser les contraintes, y compris administratives. »

De directeur d'usine à patron de multinationale

Et ainsi, comme le corrobore de son côté Jean-Pierre Lac (président de Lyon Place Financière et Tertiaire) convaincu que d'un laboratoire local fertile germent puis prospèrent les accomplissements de plus grande envergure, les intérêts personnel de Laurent Wauquiez et collectif du territoire administré peuvent s'imbriquer symbiotiquement dans une dynamique vertueuse : « S'il permet en deux mandatures de faire bondir la région au 3e rang européen, il aura acquis une légitimité bien au-delà du seul Hexagone. Il sera alors doté, à seulement 52 ans, d'une crédibilité déterminante dans sa conquête de l'Elysée », pronostique Bruno Bonnell.

Ce que le président de la CCI du Puy-de-Dôme Isidore Fartaria réinterprète allégoriquement : « Il va peut-être devenir dirigeant d'usine et ambitionne au fond de lui de prendre plus tard les rênes de la multinationale. C'est tout à fait légitime. Mais qu'il n'oublie pas une règle d'or de patron : c'est de son bilan à la tête de l'usine que dépendra l'accomplissement de son vœu ultime. Par ailleurs, la qualité d'une entreprise repose sur celle de son effectif ; si Laurent Wauquiez s'entoure du même type de collaborateur, purement politique, auquel nous sommes habitués, rien ne changera. »

Un "leader"...

Alors que dans la bouche même de la plupart des représentants du patronat, les présidents du Medef Rhône-Alpes Bernard Gaud et du Medef Lyon-Rhône Laurent Fiard en tête, le bilan « économique » et « entrepreneurial » de Jean-Jack Queyranne est plutôt salué, son adversaire est attendu, s'il est élu, sur les méthodes qu'il emploiera, sur les chantiers qu'il conduira, sur les priorités qu'il édictera.

Pêle-mêle, il lui sera tour à tour espéré ou exigé de privilégier la hiérarchisation au saupoudrage, d'être un « leader » sur des dossiers aussi déterminants que l'avenir de l'aéroport Lyon Saint-Exupéry - étouffé par les injonctions d'Air France-KLM et engagé dans un très sensible processus de privatisation - ; la restauration d'une « offre » à l'international dévastée par le scandale ERAI - qu'il a exploité politiquement contre son adversaire sortant et contribué, au sein du groupe UMP, à faire imploser lors des scrutins de l'assemblée régionale appelés à le sauver - et, déplore le président Rhône-Alpes des conseillers du commerce extérieur Hervé de Malliard, enkystée dans un millefeuille illisible et le diktat public ; la dynamisation d'une filière de l'enseignement supérieur qu'il connait particulièrement bien - il en fut le ministre de juillet 2011 à mai 2012 - et qui demeure percluse de discordes stratégiques et idéologiques ; la réorganisation du pléthorique, juteux et anarchique secteur de la formation ; la poursuite et l'intensification des dispositifs « d'aide utile » aux entreprises (fonds régional d'investissement, fonds de garantie, fonds régional d'innovation) ; l'harmonisation des leviers d'accompagnement (quels que soient les secteurs concernés) aujourd'hui otage de rivalités inter-institutions qui les cannibalisent ; le déploiement de circuits décisionnels visibles, courts, économes et efficaces...

... et un "facilitateur"

Bref, comme le synthétise le directeur sud-est de bpifrance Arnaud Peyrelongue, d'être le « facilitateur » de l'économie régionale, le charpentier d'un « écosystème » interdisciplinaire, entrepreneurial et tourné vers l'innovation, le dépositaire d'infrastructures et de moyens « mis au service » des entreprises. Et bien sûr, comme l'y convoque l'ensemble de la communauté économique ainsi résumée par Bernard Gaud, Bruno Lacroix et le président de la CGPME Auvergne Jean-Pierre Lavigne, d'être celui qui « ramènera à la raison » une collectivité dont le déficit budgétaire, l'endettement, et la fiscalité - « 2 000 € / salarié ! », fulmine le premier -  ont bondi... alors même que René Souchon, président sortant de la Région Auvergne, n'attend de la fusion aucun euro d'économie « avant dix ans ».

Un truculent Jean-Pierre Lavigne futur co-président de la CGPME Auvergne Rhône-Alpes et écoeuré par un système « socialo-communiste à bout de souffle, qui dépense ce qu'il n'a pas. Il est l'heure de mettre tout le monde au travail, d'arrêter de financer le social avec l'argent que l'on n'a pas ou de donner aux étrangers accès aux soins qui manquent désormais aux Français. Je ne suis pas d'extrême droite et soutiens totalement l'ambition de Laurent Wauquiez. » Et il devrait applaudir le militantisme de ce dernier pour une « préférence et un patriotisme régionaux » qui favorisent les entreprises du cru concourant aux marchés publics.

Un patronat auvergnat inquiet

Dans un nouveau territoire, immense et dénué de toute identité, de toute homogénéité et de toute cohérence, le candidat des Républicains est particulièrement attendu sur deux enjeux clés. Le premier porte sur sa stratégie de co-construction avec les édiles promoteurs de la métropolisation et avec des personnalités idéologiquement aux antipodes. Les confrontations avec le maire écologiste Eric Piolle s'annoncent très musclées, et sa compatibilité avec Gérard Collomb fait débat - l'inimitié qu'entretiennent ce dernier et Jean-Jack Queyranne a toutefois démontré que l'unicité partisane ne signifiait nullement l'entente professionnelle, et les louanges que Laurent Wauquiez tresse de l'action du populaire maire de Lyon lorgnent autant la nécessité de travailler prochainement avec lui que la possible hypothèse, ultérieure et même très lointaine, de lui succéder.

Second enjeu majeur : sa capacité à équilibrer les rapports de force et à maintenir la souveraineté d'une communauté entrepreneuriale auvergnate aussi excitée qu'inquiète. Excitée d'être aspirée dans la dynamique vertueuse de Rhône-Alpes, mais inquiète de l'inexorable mouvement d'exode des centres décisionnels vers une métropole lyonnaise qui a commencé d'abriter les directions régionales issues des regroupements : « Serons-nous les parents pauvres du nouvel ensemble ? », questionne le président du Medef local Gilles Duboisset, pour cette raison plus enclin au projet originel de fusion avec les régions Centre et Limousin qui sanctuarisait la capitale clermontoise.

"Faire ce qu'il dit"

Brillant, percutant, jeune, énergique, dérangeant, Laurent Wauquiez ne manque pas d'atouts pour séduire un cénacle décisionnel et entrepreneurial dont l'ampleur des attentes, c'est-à-dire des espérances et des exigences, est indexée sur celle des questionnements : colossale, et parfois même démesurée comme dans un domaine de la sécurité qui dépasse le périmètre de compétences régional.

Des publics appelés à voter, les chefs d'entreprise figurent parmi les moins idéologues, les plus suspicieux du professionnalisme politique, les plus pragmatiques et les plus lucides, les plus vifs contempteurs de programmes populistes. Mais aussi parmi les plus attentifs à la crédibilité et à l'application des promesses. Et les plus puissants relais d'influence dans l'opinion publique et les médias. Cela, le candidat et, s'il est élu, le président Wauquiez - aussi caricatural de « l'appareil politique » et dépourvu d'expérience entrepreneuriale que son adversaire - ne doivent pas l'oublier. La clé ? « Le contenu, la faisabilité, la pertinence, la cohérence et les perspectives de sa « vision » et de son « projet » pour Rhône-Alpes, schématisent Bernard Gaud et Bruno Bonnell. De la manière dont ils seront écrits et appliqués, dépendront la motivation, la mobilisation et la faculté d'entraîner de toute la communauté des décideurs et chefs d'entreprise, qui attend simplement d'être considérée et que l'on fasse ce que l'on dit. »

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Commentaires 8
à écrit le 15/12/2015 à 10:35
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"Pêle-mêle, il lui sera tour à tour espéré ou exigé de privilégier..." quel style Monsieur ! Dites simplement "tour à tour on espérera ou on exigera de lui de privilégier Et ce n'est pas la seule phrase qui m'a fait sursauter Dommage, car c'est u...

à écrit le 14/12/2015 à 12:39
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Je suis pas un fan de Wauquiez. Mais entre lui et Barnier, le choix est vite fait ! Comment penser elire un vieillard ? Pire la seule chose que vous lui trouvez de bien, c est d avoir organise des JO en 92 ... Outre l fait que c est quand meme pas te...

à écrit le 01/12/2015 à 21:34
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Je ne suis qu'un citoyen-électeur de base, mais... pour l'avoir entendu, je suis persuadé que Monsieur Wauquiez est non seulement "battant", mais... surtout lutteur. Cet homme politique jeune encore et pourtant déjà aguerri à notre région chevillée ...

à écrit le 24/09/2015 à 11:47
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Non, Laurent Wauquiez-le menteur n'est pas l'homme de la situation. À toutes les questions pertinentes que vous posez dans votre brillant article, les habitants du Puy-en-Velay peuvent répondre : Laurent Wauquiez se sert de ses mandats pour sa carriè...

à écrit le 23/09/2015 à 21:03
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In finé, que la droite et le centre n'aient dégoté qu'un Wauquiez pour la Région, ca fait la démonstration de ce que les Républicains et l'UDI sont dans une grande pauvreté de candidats. Le seul exploit pitoyable connu de Wauquiez, c'est sa va...

le 14/12/2015 à 17:44
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Comment connaissez vous youporn? Certainement du a votre esprit perspicace et d'une grande rigueur critique sur les "H"ommes.

à écrit le 23/09/2015 à 18:14
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Une chance pour la nouvelle région RAA, une opportunité pour la façade "ouest". Réequilibrage et fin du tropisme "est", condition si ne qua non de pérennisation de cette réforme et d'émergence de R2A à l'échelle des grandes régions UE.

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