Cette crise nous l'avons bien préparée !

Nos sociétés sont devenues malades car elles refusent d'admettre qu'une crise, ce n'est pas un désordre dans le cosmos, mais le signe d'un état ou d'une situation qui ne peuvent plus perdurer comme tels.

Nos sociétés sont devenues malades car elles refusent d'admettre qu'une crise, ce n'est pas un désordre dans le cosmos, mais le signe d'un état ou d'une situation qui ne peuvent plus perdurer comme tels. Les crises font partie de l'évolution de la vie et de l'histoire des civilisations. Seulement, pour comprendre ce que nous disent les crises, il faut se dégager d'un corpus de croyances et de convictions qui nuisent à une saine compréhension des changements en train de se faire. L'une d'elles est celle-ci : « Les crises sont provoquées par des causes extérieures ou extrinsèques. »

Le déni de nos responsabilités

Pour les espèces, c'est une catastrophe naturelle du type volcanisme, météorite, courants océaniques, glaciations... Pour les civilisations, toutes sortes de phénomènes naturels, comme une sécheresse responsable de la disparition des Mayas et aussi les autres, comme les barbares destructeurs de l'empire Romain. Actuellement, c'est la mondialisation pour l'économie européenne avec, en prime, l'Euro fort pour l'économie française (sauf pour l'Allemagne). Comme les espèces, les sociétés subissent les conséquences environnementales des changements qu'elles ont provoqués, comme l'exprime si bien le sous-titre du livre Effondrement de Jared Diamond (Gallimard) : Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie.

Or, la mondialisation est bien le fait des sociétés et des entreprises des pays industrialisés. Mais on préfère les « boucs émissaires » avec un déni affiché de nos responsabilités, comme en témoigne la récurrence des crises financières portées pas les mêmes facteurs (Homo œconomicus, Daniel Cohen, Albin Michel). Homo œconomicus, le soi-disant agent économique rationnel, est pétri d'irrationalité*.

Une sélection se met en place

Depuis le commencement de l'ère industrielle, l'économie est marquée par des cycles (Kondratieff) provoqués par des causes intrinsèques avec l'émergence d'innovations de rupture (Schumpeter). Pourquoi ? Tout simplement parce que des entrepreneurs introduisent des innovations qui bouleversent tous les aspects de la société. Aujourd'hui, ce sont les GAFAT (Google, Amazon, Facebook, Apple, Twitter). Et c'est tout à fait darwinien. En effet, Darwin avait compris que les variations des caractères - des gènes aux comportements - introduisent des potentialités adaptatives si les facteurs de l'environnement viennent à changer ou se limiter.

Donc, quand tout va bien dans le meilleur des mondes possibles, il n'y a pas de sélection et tout le monde a sa chance. Les populations et les variations s'accroissent. Mais les conditions environnementales (ou le marché) finissent par arriver à saturation ; et c'est là que la sélection se met en place, ce que les évolutionnistes appellent les équilibres/ponctués, et les économistes : les cycles/crises. Alors un nouveau monde se met en place, avec des survivants qui se déploient à partir des caractères sélectionnés ; d'autres se maintiennent et d'autres disparaissent.

Les crises n'ont rien appris aux gouvernements

Ainsi vont la vie et les sociétés. Alors comment faire ? Une solution serait d'éliminer les variations (les chercheurs et les entrepreneurs) avec une politique malthusienne des populations et une maîtrise de la nature. Tous les systèmes totalitaires d'essence théologique, idéologique ou politique s'y sont essayés avec les conséquences que l'on sait. Mais quand on connaît le sort fait aux chercheurs et aux entrepreneurs en France - respectivement les inventeurs et les innovateurs en langage schumpetérien, il y a de quoi s'inquiéter. Les premiers reçoivent un salaire indécent à plus de trente ans et les autres se font plumer comme des pigeons au moment de transmettre leur entreprise ; et les deux ne comptent pas leurs heures de travail. Assurément, les crises n'ont rien appris à tous les gouvernements qui se sont succédés depuis deux décennies. Cette crise, nous l'avons bien préparée !

* Un Paléoanthropologue dans l'Entreprise, Pascal Picq, Eyrolles

Pour Tout un Programme, Pascal Picq interviendra le 19 novembre à l'EMLYON

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Commentaires 15
à écrit le 26/09/2014 à 9:51
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Dit autrement, nos oligarchies pseudo-démocratique et matérialistes en ont rien à fichedes petits blancs de la France périphérique Ils ont créé un monstre soviétique : l'Europe de Bruxelles, Ils n'admettent pas que sans innovation ni disponibilités...

à écrit le 26/09/2014 à 9:42
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quelle crise vous avez definie la crise des sumpride qui est une manipulation boursiere celle du petrole en 1973 qui n'est qu'un reajustement de l'offre et la demande mondial puis avec le cafe , le cacao, et toujours la speculation desole mais ce...

à écrit le 26/09/2014 à 8:20
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Dans la nature, le cycle de vie est entretenu par l'énergie du soleil. Le cycle énergétique est entretenu par l'énergie sous toutes ses formes. C'est l'énergie qui doit être pris en compte pour expliquer le chomage, la croissance, etc...

à écrit le 26/09/2014 à 1:10
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"Assurément, les crises n'ont rien appris à tous les gouvernements qui se sont succédés depuis deux décennies." Ils ont depuis un siècle appris à s'enrichir avec les crises qu'ils ont provoquées. "Cette crise, nous l'avons bien préparée !" : effectiv...

à écrit le 25/09/2014 à 21:04
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Plumés, quand on voit leur train de vie et leurs placements immobiliers ou mobiliers, j'ai du mal à croire qu'ils se fassent plumés,! encore un discours pour convaincre les illéttrés et les ignares !!!!

à écrit le 25/09/2014 à 19:37
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Etonné de la conclusion! Les chercheur sont en effet mal payé, par l'état et les entreprises car c'est là qu'il y en a le plus; Les entrepreneurs ne sont plus des entrepreneurs s'ils vendent leurs entreprises mais sont alors des financiers. Ils s...

à écrit le 25/09/2014 à 19:04
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Ça fait plaisir de voir que quelqu'un ouvre les yeux des autres, mais je me permets d'ajouter un facteur : pour ça dure, il faut comprendre que rien ne dure si on ne respecte pas son propre environnement, dans l'entreprise comme sur la planète. Voil...

à écrit le 25/09/2014 à 18:41
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Je trouve cet article excellent. Excellent dans son réalisme. J'avais très modestement envisagé d'exprimer cette pensée. Non seulement vous m'avez devancé, et qui plus est à un niveau qui me surpasse. Je vous en remercie.

à écrit le 25/09/2014 à 18:12
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Ceci est un fait, mais il faut aussi compter sur les personnalités de nos dirigeants, tous plus incompétents, les uns que les autres! une seule chose est d'une valeur primordiale à leur yeux, leurs élections (ou ré-élections ! )

à écrit le 25/09/2014 à 18:02
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Une analyse sur les fondements de la crise dans laquelle on ne trouve pas une seule fois le mot "énergie" ou "pétrole" est, pour le moins, très incomplète.

à écrit le 25/09/2014 à 17:44
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Peut être ? Mais il est une chose certaine, c'est que la France depuis Pompidou et De Gaulle n'a plus de chef d'Etat mais que de petits politiciens a l'esprit étriqué qui ne sont intéressés que par leur ego et les bulletins de vote plutôt que par un...

à écrit le 25/09/2014 à 17:25
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Révolutionnaire !

le 25/09/2014 à 20:35
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Oui, c'est ce que je me disais aussi ...

à écrit le 25/09/2014 à 16:40
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Qu' en est il de notre instinct grégaire de domination ? Certains se coupent un bras pour être parmi les gagnants . D autre crachent sur les victimes en criant très fort que c est de leurs fautes . Ainsi va le monde .........

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